Le Pape a reçu en audience les évêques togolais vendredi 27 octobre 2023, à l’occasion de leur visite ad limina apostolorum. Évoquant la vie pastorale, François a encouragé les prélats togolais à mettre l’accent sur la formation des séminaristes, des formateurs et des laïcs. C’est ce qu’a révélé Mgr Benoit Alowounou, président de la Conférence épiscopale togolaise lors de l’entretien accordée à Vatican News.
La formation des séminaristes ainsi que celle de leurs formateurs et des laïcs, les défis pastoraux de l’Église au Togo et ses relations avec l’État de ce pays d’Afrique de l’ouest et ceux du monde, sont autant de sujets abordés par le Pape et les membres de la Conférence épiscopale du Togo. Mgr Benoit Alowonou évêque de Kpalimé (sud-ouest) et président de la Conférence épiscopale du Togo, a donné des détails de leur échange avec le Saint Père.
L’épiscopat du Togo a été reçu vendredi 27 octobre 2023 en audience par le Pape François, en conclusion de leur visite ad limina apostolorum. Que pouvons-nous retenir de votre rencontre avec le Saint-Père?
Tout d’abord, je voudrais me féliciter du climat dans lequel s’est déroulé cette audience. Notre rencontre avec le Pape s’est déroulée dans un climat de joie et de fraternité. Concernant nos échanges sur la vie de l’Église au Togo, le Pape nous a interrogé sur les défis actuels de notre Église particulière. Nous lui avons fait savoir que le premier de ces défis est la formation des futurs prêtres, nos séminaristes. Nous avons en tout 300 séminaristes pour le «petit Togo», un nombre dont s’est félicité le Pape en le qualifiant de «grenier de vocation».
Oui, c’est un grenier de vocation, mais si la formation intellectuelle et spirituelle de nos séminaristes reste la priorité, il faut savoir qu’aujourd’hui notre grand souci, c’est bien les moyens financiers. Il en va de même de la situation économique difficile notre pays, voire de l’Afrique toute entière. La formation de ces futurs prêtres nécessite beaucoup de moyens financiers. Et face à cette situation économique difficile, le Pape nous a demandé comment nous arrivons à assurer la prise en charge de nos séminaristes. Nous lui avons fait savoir que nous sommes en train de réfléchir à d’autres stratégies plus efficaces pour faire face à la situation financière. Et nous sommes confiants, car le Seigneur est dans la barque.
Avez-vous abordé d’autres points concernant la vie pastorale de l’Église au Togo?
Oui, avec le Saint-Père nous avons aussi parlé de la mission des congrégations religieuses dans notre pays. Nous avons plus d’une cinquantaine de congrégations religieuses qui font partie intégrante de la vie l’Église au Togo. Elles interviennent dans plusieurs domaines tels que la santé, l’enseignement et aussi le social. Le Souverain pontife a apprécié tout ce que les religieuses peuvent faire dans un diocèse.
Quels ont été les mots du Pape à l’endroit des prêtres? A-t-il donné certaines directives à votre Conférence épiscopale?
À nous évêques, il nous a demandé de mettre un accent particulier sur la formation spirituelle des séminaristes bien évidement, mais surtout sur la formation des formateurs. L’occasion pour nous de lui indiquer que dans nos séminaires au Togo nous utilisons notamment la méthode des sulpiciens. Il a apprécié ce système qui consiste à suivre véritablement les personnes formées. Le Saint-Père en a profité pour nous indiquer comment arriver à donner la formation spirituelle et humaine, sans toutefois chercher le social qui serait vraiment un désir de sortir du spirituel pour aller vers ce qui n’est pas spirituel.
Quel a été le contenu de vos échanges concernant la situation sociopolitique du Togo?
Nous pouvons dire que nous marchons avec la sagesse et la prudence. La sagesse et la prudence, c’est-à-dire qu’il ne faut pas se jeter dans la mer pour dire ce que les autres doivent dire à notre place. Et surtout, le Saint-Père nous a invités à former, à donner une formation sociale, doctrinale, au laïcat. Il ne revient pas aux évêques ou aux prêtres de prendre la place des politiques. Si nous avons un laïcat, bien formé, je crois que la formation qu’ils auront, devrait leur permettre de jouer au mieux leur rôle en tant qu’hommes politiques, en tant que chrétiens qui occupent des places, qui sont les places des chrétiens dans la société.
Suivre Mgr Alowonou, évêque de Pkalimé et président de la Conférence épiscopale du Togo.
Quel est aujourd’hui l’état des relations entre l’Église et l’État Togolais?
Ce n’est pas un fleuve tranquille. Cela ne veut pas dire qu’il y a la guerre entre nous, non loin de là. Mais parfois on a l’impression que le chrétien ou le prêtre ou encore l’évêque veut prendre la place du politique. Ce qui n’est pas vrai. Et comme vous le savez, partout, de manière générale, les relations entre l’Église et l’État n’ont jamais été très bonnes. Là où on dit que ça va, et que les relations sont très bonnes, cela veut dire que les pasteurs que nous sommes, avons vraiment notre devoir, notre mission de guetteur et de prophète pour la politique. Nous devons dire ce qui est. Pour nous, l’Église doit être la voix des sans voix. L’Église doit être la voie qui conduit à la sainteté. Dans notre pays, il y a le ministère de culte, où nous faisons partie de la commission des religieux et nous donnons notre part de vérité, notre part de lumière. Aussi il faut le dire nous avons remercié le Seigneur d’avoir permis cette occasion de rencontrer le Saint-Père et de lui présenter nos soucis et les joies. Nous avons profité de l’occasion pour le questionner sur les défis du moment dans notre monde.
Que pouvons-nous savoir de ces défis actuels du monde?
Répondant à notre préoccupation, le Pape a touché du doigts deux points: d’abord la violence dans notre monde aujourd’hui. Il y a des zones de guerre, des zones de violence partout dans le monde entier avec leurs lots de morts. Le deuxième point, c’est le genre. Si aujourd’hui on parle de genre, en parlant de la non-différence entre les réalités naturelles, cela donne beaucoup à réfléchir.
A cet effet, en tant qu’évêques, le Pape vous a-t-il laissé des recommandations particulières?
Le Saint-Père a indiqué que dans de tels cas il ne faudrait pas rejeter le pécheur, mais tout en connaissant sa faiblesse, il a exhorté à l’aider à revenir sur le bon chemin. Aussi, a-t-il souligné, c’est d’être des prêtres, des pasteurs, plein de miséricorde, comme le Christ l’a recommandé. «Soyez miséricordieux et ramenez le pécheur sur le bon chemin et non rejetez le pécheur».
Quels sont les véritables défis de l’Église aujourd’hui au Togo?
Nous devons arriver à la formation du peuple de Dieu pour que le spirituel ne soit pas un argument de recherche matérielle. Dieu nous a tant donné, et ce qu’il nous a donné c’est une richesse, un trésor. Et aussi que le consacré et le laïc soient à leurs places respectives. Nous ne devons pas brader le spirituel au profit du bien matériel. Nous devons arriver à ne pas céder de place à la simonie. Le faire constituerait un danger pour notre Église. Et cela fait partie des défis à relever par notre Église particulière.Dans ce sens,le Saint-Père nous a conseillé d’aider les autres, et le prêtre, à arriver à ce point d’importance de la vie sociale et ecclésiale.
Quel est le message à adresser à l’issue de cette visite ad limina au peuple de Dieu au Togo et à tout le pays?
De cette visite ad limina apostolorum, il ressort un message d’unité. L’Esprit d’unité avec le Saint-Père. Nous formons une seule famille, un seul peuple. Nous leur apporterons aussi l’esprit de courage pour continuer à annoncer le Christ et que la vie ne s’arrête pas ici-bas, mais nous devons toujours nous orienter vers le ciel. Et, à notre pays, la paix.
Entretien réalisé VN