Côte d’Ivoire : À la découverte du parcours inspirant de Sompohi Baya, père de la Gothimascologie

Jean Richard N'Guessan
Par
Jean Richard N'Guessan - Jean Richard N'gue-khan
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 Figure majeure de la création contemporaine ivoirienne, Sompohi Baya incarne la fusion parfaite entre talent, persévérance et vision spirituelle. L’homme est un passionné d’art. Sculpteur et dessinateur d’exception, il est surtout connu pour avoir fondé la Gothimascologie – ou Glalogie –, une discipline artistique et philosophique qu’il définit comme « l’inverse du masque, reflet de l’église et des forces spirituelles universelles ». Son histoire et son parcours forcent le respect. Des rencontres telles que celles avec Kim Graig, Aminata Diop ou encore Niangoran Boua ont bouleversé sa trajectoire. Les difficultés ne l’ont pas ébranlé. Il a su se construire et affiner son talent. Il est docteur Honoris Causa. Aux États-Unis, il a été nommé Ambassadeur de la paix. Dans cet entretien, il revient sur ses victoires mais aussi ses déboires. Échanges.

Alléluia Event : Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Sompohi Baya : Merci d’être venu dans mon univers. Je suis Sompohi Baya Bruno, mais j’exclus souvent le « Bruno » car partout où je suis passé, je n’ai pas rencontré un blanc portant le nom de ma famille. « Sompohi » vient de mon père, qui était également artiste.

Alléluia Event : Expliquez-nous votre passion pour l’art ?

Sompohi Baya :  Ma passion pour l’art me vient de mon père. Même sans aller à l’école, je dessinais déjà. À l’époque, je dessinais pour mes amis. Ma célébrité a commencé à l’âge de six ans. J’ai passé mon CEPE en 1974 à Man. Grâce à mes talents, je suis ensuite venu à Abidjan.

Alléluia Event : Quelles ont été les grandes étapes de votre parcours, de votre localité d’origine jusqu’à l’autre bout du monde ?

Sompohi Baya : Je vous explique. À Abidjan, j’ai travaillé au Bureau de Construction et d’Équipements (BCE), après un passage à l’école de mécanique de Bimbresso. J’ai ensuite intégré la CARENA, avant d’être formé à l’École des Beaux-Arts (aujourd’hui INSAAC) par de grands maîtres comme le Professeur Georges Niangoran Boua. Mon destin a failli basculer. Je devais devenir professeur, mais le directeur Dogo Yao – il faut que je cite son nom – m’a renvoyé pour une fausse accusation de sa femme, qui prétendait que je l’avais draguée. Après cela, je suis devenu dessinateur dans un supermarché. C’est là que j’ai rencontré un monsieur qui m’a conseillé de tenter ma chance en France, où mon art serait mieux vendu et apprécié. Dans la même semaine, je me suis rendu à l’ambassade d’Italie et les choses se sont accélérées : je suis parti en Italie en 1983 grâce à une bourse. De 24 000 francs que je touchais, je suis passé à 1 million.

Après l’Italie, j’ai passé un concours à l’Académie des Arts de Norvège et j’ai été admis. On m’a demandé si je voulais faire un doctorat ou enseigner ; j’ai choisi l’enseignement. J’ai été admis à l’École nationale d’art d’Oslo. Après deux ans, je suis devenu enseignant. J’ai suivi un stage, puis je suis revenu à Abidjan, où j’ai intégré la fonction publique comme professeur. En 2005, j’ai quitté la Côte d’Ivoire pour les États-Unis.

Alléluia Event : Qu’est-ce qui a favorisé votre retour au bercail ?

Sompohi Baya : C’était l’envie de revoir ma famille et de partager mon expérience. À mon retour, j’ai fait comme Michael Jackson : je me suis agenouillé pour embrasser le sol. Aux États-Unis, j’ai participé à de nombreux vernissages et je percevais 1 000 dollars pour une heure de cours.

Alléluia Event : Si vous devez présenter votre art, la Gothimascologie, que diriez-vous ?

Sompohi Baya : La Gothimascologie représente « l’inverse du masque », qui symbolise une église. Il n’y a pas de meilleur conseil que de suivre les recommandations de Dieu : « Aimez-vous les uns les autres ». Dans cette représentation, plusieurs forces et présences coexistent. On retrouve des expressions graphiques, l’étoile de David, le Yin et le Yang, le croissant de l’islam… Le masque est plus vieux que le monde ; cela signifie que là où Dieu est, le Gla s’y trouve.

Alléluia Event : Tout cela semble complexe…

Sompohi Baya : Quand je parle de Gothimascologie ou de Glalogie, je veux simplement dire que nous avons besoin de nous reconnaître. Il ne faut pas juger la culture des autres. Ceux qui le font doivent passer par le « jugement des masques ». Qui sommes-nous pour dire que la culture de l’autre est meilleure ? Nous devons passer par ce jugement et cesser de commettre des erreurs. Je suis Ambassadeur de la paix ; par notre ressemblance, pourquoi dire que notre église, notre religion ou notre culture est meilleure que celle des autres ?

Alléluia Event : Que retenir de ce riche parcours ?

Sompohi Baya : C’est pour cela que j’ai créé l’Université Sompohi Baya. Cette dimension est unique. L’art, dans sa dimension, est unique. L’unicité de l’art est une force unique. Personne ne peut révéler Dieu ou la Gothimascologie à notre place.

Alléluia Event : À quand le prochain vernissage, pour permettre aux jeunes de vous découvrir ?

Sompohi Baya : Je suis prêt pour un vernissage, qui aura lieu très bientôt.

Alléluia Event : Nous arrivons à la fin de cet entretien, quel est votre message ?

Sompohi Baya : Pour terminer, j’ai suivi des études de Master 2 en théologie pour comparer le masque à la théologie chrétienne, afin de comprendre le mystère qui se cache derrière. Je suis retraité et mon dernier fils a 22 ans ; il sert dans l’armée américaine. Je suis donc libre et disposé à revenir au pays pour transmettre mon savoir et le présenter au peuple ivoirien et africain.  J’ai été nommé Ambassadeur Honoris Causa dans ma ville à Man, par le maire de Morbier en France, ainsi que par Hortense Aka Anghui, maire de la commune de Port-Bouët. Je suis également Ambassadeur pour la paix universelle. J’ai été ex-président de la CEI à New York, New Jersey et Connecticut. J’invite à la paix et à la cohésion sociale. Je vous remercie.

Entretien réalisé par JRN

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Jean Richard N'gue-khan
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Professionnel avec plus de 15 ans d’expériences dans les domaines du journalisme et de la communication stratégique, des médias et du numérique. Journaliste-Reporter, chroniqueur TV et Radio, analyste politique, Jean Richard N'guessan Kan est un passionné de Jésus Christ. Serviteur de Dieu, il travaille à la divulgation de la BONNE PAROLE du royaume.