Niger, Burkina-Faso, Somalie, Kenya, Éthiopie, Mali, Congo… Les pays d’Afrique Subsaharienne font face à une flambée de l’extrémisme islamique. Un péril qui menace tout particulièrement les chrétiens.
Le 10 juin, des extrémistes islamiques ont attaqué un village au Niger, à la frontière avec le Burkina-Faso. Ils ont laissé 72 heures aux chrétiens pour partir ou se convertir à l’islam. Soixante-neuf familles ont dû tout quitter. Ils habitent désormais dans des abris de fortune dans les bois, sous la pluie.
Une atmosphère de peur
Dans un autre village non loin de là, les islamistes interdisent aux chrétiens de jouer de la musique pendant le culte, obligent les femmes chrétiennes à porter le hijab et les hommes de longues barbes. La pression est tellement forte que, dans plusieurs villages, les cultes chrétiens n’ont tout simplement plus lieu. Yonas Dembele, analyste chez Portes Ouvertes, s’inquiète:
«La présence et l’influence djihadistes créent une atmosphère de peur et de vulnérabilité pour les chrétiens.»
La popularité du djihadisme s’expliquerait selon notre analyste par le manque de perspective d’emploi, les difficultés économiques liées aux sécheresses à répétition, l’importance du crime organisé et la corruption des fonctionnaires.
L’attrait du djihadisme
Tous ces facteurs combinés fourniraient un «terreau fertile pour que les groupes djihadistes puissent recruter et trouver du soutien», précise Yonas Dembele. Leur mentalité extrémiste influence alors aussi malheureusement certains musulmans modérés qui vont moins tolérer la liberté de culte des chrétiens. D’autres au contraire vont être eux-mêmes considérés comme infidèles, et donc être persécutés par les plus extrémistes.
Le 9 juin, les djihadistes du groupe Al-Shabaab ont attaqué l’hôtel Pearl Beach à Mogadiscio, capitale de la Somalie, faisant 9 morts. Quatre-vingt personnes ont été prises en otages pendant plusieurs heures, avant leur libération par les forces de l’ordre somaliennes. En réponse, ces dernières ont tué 19 djihadistes le 12 juin, dans une contre-offensive. Mais Yonas Dembele ne s’en réjouit pas:
«Aucune lutte anti-terroriste ne sera militairement efficace sans mesures socio-économiques limitant l’attrait que le djihadisme opère sur les populations locales.»
Des écoles chrétiennes fermées
Al-Shabaab a récemment mené des attaques dans des pays limitrophes: Kenya et Éthiopie. Au cours du mois de juin, 11 membres des forces de l’ordre kényanes ont perdu la vie dans six attentats perpétrés par ces extrémistes islamiques. Et trois autres ont été blessés dans l’attaque d’un bus près de Nairobi. Dans le même temps, les forces de l’ordre éthiopiennes ont affirmé avoir déjoué un attentat à la frontière avec le Kenya. Dans ces deux pays, les chrétiens figurent évidemment parmi les populations les plus menacées, notamment dans les régions où elles sont minoritaires.
Yonas Dembele s’inquiète également de l’augmentation du militantisme djihadiste dans d’autres régions d’Afrique Subsaharienne. Au Mali, malgré la rédaction d’une nouvelle constitution et des élections promises pour février 2024, la violence n’a pas quitté le pays: des casques bleus ont trouvé la mort dans une embuscade le 9 juin. À l’Est du Congo, les «soldats de la paix» se retirent. Ils laissent le champ plus libre aux diverses milices islamistes, qui ont fait 55 morts dans des attentats perpétrés les 8 et 11 juin. Au Burkina-Faso, des djihadistes ont tué une douzaine de villageois à Sara le 16 juin. Yonas Dembele explique que ces attaques à répétition aboutissent régulièrement à la fermeture d’établissements scolaires, notamment chrétiens. Ce qui prive les jeunes chrétiens d’éducation et donc de perspectives d’avenir.
P.O